Un tribunal stambouliote a confirmé vendredi la condamnation à 10 mois de prison avec sursis prononcée en avril contre le célèbre pianiste turc Fazil Say, accusé d'insulte à l'islam, malgré l'invalidation de ce premier jugement en appel.
La cour a condamné M. Say, qui n'était pas présent à l'audience, à 10 mois d'emprisonnement, avec un sursis-mise à l'épreuve de deux ans, a affirmé à l'AFP l'avocate du pianiste, Me Meltem Akyol.
La juriste a indiqué que cette décision ouvrait la voie à un appel devant la Cour de cassation.
M. Say avait été condamné le 15 avril à 10 mois de prison avec un sursis-mise à l'épreuve de cinq ans pour "insulte aux valeurs religieuses d'une partie de la population" après avoir publié des tirades provocatrices contre les musulmans sur Twitter.
Ce jugement avait relancé le débat sur les atteintes à la liberté d'expression en Turquie.
Un autre tribunal saisi en appel avait annulé le 26 avril ce premier jugement en raison d'un "vice de procédure" et renvoyé le dossier à une cour de première instance.
"Demain, je continuerai à vivre et à produire. En continuant de vivre demain, en continuant de penser demain en homme libre, je produirai des oeuvres encore meilleures", a commenté vendredi Fazil Say sur son compte Twitter, après le prononcé du jugement.
Connu pour son athéisme militant, le pianiste virtuose a été poursuivi sur la plainte de trois particuliers qui s'estimaient insultés par ses tirades provocatrices.
Dans l'acte d'accusation dressé contre Fazil Say, 43 ans, sont recensés des tweets tels que "je ne sais pas si vous vous en êtes aperçus, mais s'il y a un pou, un médiocre, un magasinier, un voleur, un bouffon, c'est toujours un islamiste".
Il s'était également moqué de l'appel à la prière du muezzin, citant des vers du grand poète persan du XIe siècle, Omar Khayyam.
Présent à la seule première audience du procès en octobre 2012, Fazil Say avait clamé son innocence en assurant qu'aucun de ses messages "n'avait pour objectif d'insulter, d'humilier" l'islam et ses fidèles.
Lors d'un entretien télévisé, il avait accusé quelques semaines plus tard le Parti de la justice et du développement (AKP) au pouvoir depuis 2002 d'être à l'origine des poursuites lancées contre lui.
"C'est politique, tout ça", avait-il affirmé, "ils veulent me faire croire en Dieu en me faisant passer un an et demi en prison".
Sa condamnation en avril a suscité une volée de critiques contre la Turquie, régulièrement épinglée par les ONG de défense des droits de l'Homme pour ses atteintes à la liberté d'expression.
La Commission européenne s'était déclarée "préoccupée" et avait appelé Ankara à respecter "pleinement" la liberté d'expression. (AFP, 20 sept 2013)
http://www.info-turk.be/421.htm#say