L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a demandé mardi à la Turquie de remettre en liberté les journalistes emprisonnes et de réformer sa législation sur les médias.
"Actuellement, plus de 40 journalistes sont emprisonnés et des centaines d'autres sont poursuivis en justice et risquent la prison en cas de condamnation", a dénoncé la représentante de l'OSCE pour la liberté des médias, Dunja Mijatovic, dans une lettre au ministre turc des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu, citée dans un communiqué.
"Mes services observent avec une inquiétude croissante l'augmentation du nombre d'actions en justice qui menacent de prison les journalistes en Turquie", a-t-elle écrit.
Des reporters sont souvent condamnés pour avoir traité de sujets sensibles, publié des informations secrètes ou critiqué les autorités, décourageant ainsi tout journalisme critique, a relevé Mme Mijatovic.
L'OSCE "reconnaît pleinement la menace à la sécurité nationale que représente le terrorisme et la nécessité de lutter contre", a-t-elle précisé.
"Dans le même temps, nous insistons aussi sur le droit du public d'être informé sur les sujets d'importance publique", a indiqué Mme Mijatovic.
"La lutte contre le terrorisme ne doit pas être utilisée par les gouvernements pour restreindre la liberté des médias", a-t-elle souligné.
Seuls les fonctionnaires devraient être tenus pour responsables de la publication de documents classés secret, pas les journalistes, a ajouté Mme Mijatovic.
"La criminalisation de la violation du secret commise par des non-fonctionnaires, dont des journalistes, pourrait priver la population d'informations importantes d'intérêt public et elle met ainsi en péril le journalisme d'investigation", a conclu Mme Mijatovic. (AFP, 14 sept 2010)
Demir SÖNMEZ - Page 479
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L'OSCE demande à la Turquie de libérer les journalistes emprisonnés
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Assassinat de Hrant Dink : la Turquie condamnée par la CEDH
La Turquie a été condamnée mardi dans le cadre de l'assassinat en 2007 du journaliste Hrant Dink, la Cour européenne des droits de l'Homme estimant notamment que Ankara n'avait pas protégé le journaliste assassiné par un nationaliste.
La décision a été saluée par les proches du journaliste turc d'origine arménienne, assassiné le 19 janvier 2007 alors qu'il dirigeait à Istanbul l'hebdomadaire bilingue turco-arménien Agos. Ankara a pour sa part promis de faire amende honorable et a renoncé à faire appel.
La publication dans ce journal d'articles sur la question de l'identité des citoyens turcs d'origine arménienne, avait valu à Hrant Dink d'être reconnu coupable en 2006 de "dénigrement de l'identité turque".
Le journaliste s'était notamment attiré la colère des nationalistes pour avoir qualifié de génocide les massacres d'Arméniens commis en Anatolie entre 1915 et 1917, un terme rejeté par Ankara.
Il avait été assassiné de trois balles dans la tête à la sortie des bureaux d'Agos par un jeune nationaliste.
Invoquant le droit à la vie, les plaignants affirmaient devant la CEDH que l'Etat turc a failli à son obligation de protéger la vie du journaliste. Selon eux, le jugement de culpabilité à son égard aurait fait de lui une cible pour les groupes ultranationalistes.
L'arrêt de la CEDH observe que "l'on peut raisonnablement considérer que les forces de l'ordre étaient informées de l'hostilité intense des milieux ultranationalistes contre l'intéressé".
"Elles auraient dû savoir qu'il était tout particulièrement susceptible de faire l'objet d'une agression fatale et ce risque pouvait passer pour réel et imminent", selon les juges de Strasbourg.
Ils ont par ailleurs conclu que la confirmation du verdict de culpabilité pris à l'encontre de Hrant Dink par les juridictions pénales "a constitué une atteinte injustifiée à son droit à la liberté d'expression".
La CEDH a alloué 105.000 euros aux plaignants pour dommage moral.
Le ministère turc des Affaires étrangères a annoncé dans un communiqué que la Turquie ne ferait pas appel de la décision.
"Des travaux seront menés pour appliquer les attendus de la décision et toutes les mesures seront prises pour qu'à l'avenir de telles violations se produisent", a-t-il poursuivi.
Réunis devant les locaux d'Agos, les proches de Hrant Dink ont salué le verdict.
"Après cette décision, nous voulons croire que beaucoup de choses vont changer sur le plan de la justice et de la politique en Turquie", a déclaré la veuve du journaliste, Rakel Dink.
"Nous espérons que l'Etat turc (...) abandonnera son attitude de condamnation de l'innocent et accomplira les premiers pas vers le comportement d'un Etat digne de la confiance de la société", a-t-elle ajouté, en larmes, tandis que l'avocate Fethiye Cetin décrivait l'arrêt comme un "document de la honte pour la justice turque".(AFP, 14 sept 2010)Lien permanent Catégories : Droits de l'humaine -
Référendum en Turquie : la montagne accouche d’une souris
lundi 13 septembre 2010
Ce referendum est tout-à-fait significatif de la vie politique en Turquie : alors que tous les acteurs politiques turcs, les intellectuels et les observateurs étrangers s’accordent pour dire que la question kurde est celle que la Turquie contemporaine se doit de résoudre impérativement et que la démocratisation de la Turquie passe par l’obligation de changer la constitution - héritage du coup d’état militaire de 1980 - les questions posées par voie référendaire ne sont pas à la hauteur des enjeux.
Les forces politiques, nationalistes d’un côté, islamistes de l’autre, s’affrontaient autour d’une réformette constitutionnelle qui ne résoudra rien d’essentiel ; ceci est si vrai que le parti pro kurde BDP (Parti pour la Paix et la Démocratie) n’a pu faire d’autre choix que d’appeler au boycott pour dire que les réformes proposées sont "cosmétiques", sans portée réelle, et qu’elles ne donnent aucune réponse aux questions que le peuple kurde pose légitimement depuis des décennies.
Que les instances politico-judiciaires, qui sont sous la coupe des "laïcs" nationalistes de "gauche" et d’extrême droite, passent sous la coupe du parti islamiste, ne fera pas avancer la démocratie dans le pays, n’en déplaise aux institutions européennes qui, avant même d’en connaître le résultat, saluaient déjà cette révision constitutionnelle comme "un pas dans la bonne direction".
Il est bien sûr intéressant que la dissolution des partis politiques soit soumise au contrôle du Parlement, mais ce parlement turc ne sera pas pleinement représentatif du peuple tant que les voix des partis qui n’ont pas atteint le seuil des10% viendront renforcer mécaniquement le parti majoritaire, l’AKP en l’occurrence.
Que les auteurs du coup d’État militaire de 1980 puissent être jugés est une décision qui va "dans la bonne direction" mais quoi de plus normal ? C’est l’inverse qui était inconcevable !
L’enjeu de cette révision constitutionnelle est tout autre : il est purement politicien et chaque camp avance ses pions pour gagner les prochaines échéances électorales. A ce petit jeu l’AKP, qui a mis tous les moyens d’État à contribution dans une campagne très agressive, est sorti vainqueur, c’est incontestable, mais où sont les perspectives politiques à plus long terme ?
Le boycott kurde mérite d’être étudié de près ; dès l’annonce du résultat, Selahattin Demirtaş, co-président de BDP, a estimé que le pari était gagné et le BDP renforcé : "le boycott est une victoire historique pour les Kurdes", a-t-il notamment déclaré.
L’agence ANF (Agency News Firat) note que plus de 50% des électeurs ont boycotté le scrutin dans les villes où le BDP était arrivé en tête aux dernières élections de 2009.
Dans un pays où le vote est obligatoire, sous peine d’une lourde amende de 22 LT (ce que le gouvernement n’avait pas manqué de rappeler tout au long de la campagne), 65 % des électeurs de Diyarbakir, note encore ANF, ne se sont pas déplacés et se sont abstenus de voter, 33% à Tunceli, 46% à Mus, 50% à Siirt et Igdir, 57 % à Van et à Mardin, 63% à Batman, 78% à Sirnak ; la palme revient à Hakkari avec 93% ; le boycott est également massif dans les quartiers peuplés à majorité de Kurdes de grandes métropoles turques comme Istanbul, Adana et Mersin.
"Les Kurdes ont donné une leçon de démocratie, il faut travailler dès maintenant pour proposer une nouvelle constitution“ martèle Selahattin Demirtaş, délibérément offensif.
"Le modèle espagnol en matière d’autonomie régionale est celui que nous cherchons", déclare, de son côté, le PKK qui, d’après une dépêche de l’AFP, "déposerait les armes si la Turquie adoptait un modèle de régions autonomes comparable à celui de l’Espagne <http://www.institutkurde.org/info/depeches/le-pkk-deposerait-les-armes-si-la-turquie-adoptait-le-modele-espagnol-leade-2747.html> ".André Métayer
Les Amitiés kurdes de Bretagne <http://akbdrk.free.fr/spip.php?auteur1>
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