A Genève, se sont rassemblés des femmes et des hommes pour exprimer leur colère face aux humiliations infligées aux femmes par les organes officiels d’Etat. Ce rassemblement a aussi été organisé aussi pour annoncer le mouvement BASTABASSE « contre la répression faite aux femmes engagées» avec l’encouragement de la ligue suisse des droits humains (LSDH)
Ce mouvement se veut sans couleur politique particulière, même si à ce stade n’était présente qu’une frange représentative (Les Verts et Solidarité). A l’avenir seront mobilisées toutes les forces représentant la société civile (personnalités diverses, artistes, sportifs, philosophes) diverses associations et tendances politiques.
C’est d’abord Jacqueline Roiz, initiatrice du mouvement et députée au Grand Conseil genevois qui s’est exprimée, ensuite Mme Maria Casares, conseillère municipale et Lucia Dahlab, enseignante à Vernier (GE), musulmane féministe.
Ont entre autre participé Ueli Leuenberger, conseiller national, Pierre Losio, Président du Grand Conseil de Genève, Julien Cart, Alfonso Gomez et Anne Moratti , conseillers municipaux en Ville de Genève et la ligue suisse des droits humains.
En 2012 sera élaborée une pétition adressée au Conseil Fédéral et à l’ONU afin que cesse ces attaques ciblées contre des femmes pendant les manifestations et après... Ainsi que pour maintenir leur visibilité dans les actions politiques et sociales.
BASTABAS ! BASTABAS ! Basta de tabasser les femmes !
Femmes et hommes indignés par la répression et la violence d’Etat, réagissez !
Les images et les témoignages qui nous sont parvenus de Biélorussie et d’Egypte, nous montrent des femmes agressées, humiliées dans leur féminité et, le comble, par des structures officielles d’Etat.
Viols, tortures et humiliations infligées aux femmes font depuis longtemps partie du « kit de guerre » des autorités et des forces armées, soit pour atteindre une population dans ce qu’elle a de plus sacré, comme la famille, soit pour opprimer l’action civique. Nous l’avons constaté par exemple au Rouanda, en ex-Yougoslavie, au Sri-Lanka, en République démocratique du Congo.
Nous constatons une répression brutale des manifestations pacifiques dans différents pays. Cette répression par des Organismes d’Etat passe par une violence impitoyable et qui vise spécifiquement les femmes. Les femmes qui luttent et s’engagent pour la démocratie prennent les risques d'être blessées au même titre que les hommes lorsqu’elles s'emparent, avec eux, de la place publique. Mais elles n’ont pas à payer un prix en plus parce qu’elles sont femmes !
Il faut stopper la répression sauvage de l'armée et de la police contre les femmes et les hommes manifestant pacifiquement et voulant un changement pour leur propre pays. Les libertés démocratiques, le droit de manifester doivent être respectés.
Nous, femmes et hommes de Genève et d’ailleurs sommes solidaires avec les femmes d’Egypte, les femmes de Biélorussie et toutes celles qui se mobilisent pour un avenir meilleur.
La communauté internationale a la responsabilité de leur garantir la possibilité d’être présentes et visibles dans les processus de changements sociaux et politiques. Afin de défendre des valeurs communes à tous et toutes : les droits humains et la dignité.
Les actes d’humiliations faites spécifiquement aux femmes risquent de les retirer de l’espace public et de les cantonner à des rôles spécifiques, déterminés par une organisation patriarcale qui oppresse les femmes et les empêchent de s’exprimer. La société et le monde ne doivent pas perdre cette ressource de stabilité !
La violence faite aux citoyennes du monde est inacceptable et doit être condamnée.
Nous demandons une réaction diplomatique de nos autorités fédérales condamnant ces pratiques. Nous demandons également à l’ONU de faire cesser par tous les moyens la répression faites aux femmes par les organismes d’Etat.
Mouvement pour une protection des femmes engagées.
Rassemblement place des Nations du 29 décembre 2011.
Discours de Lucia Dahlab, enseignante, citoyenne et musulmane,
Les femmes ont toujours participé aux changements de société, elles ont été actives dans les périodes de crises, mais ensuite, non seulement leur rôle est oublié, mais en plus on leur demande de rentrer chez elle reprendre la place que les sociétés patriarcales leur assignent, loin du pouvoir et des instances de décisions.
Avec les soulèvements des pays arabes, nous avons pu voir des femmes participer activement, présentent dans la rue, dans les manifestations, dans les débats et dans les médias, tout particulièrement en Tunisie, en Egypte et en Syrie.
Pour les femmes musulmanes féministes, ce fut un signe d’espoir et la preuve que les femmes dans les sociétés à majorité musulmane souhaitent aussi jouer un rôle dans la construction de leur société. Elles désirent agir concrètement, apporter leurs contributions à travers leur travail associatif, politique, économique et social.
Dans de nombreuses sociétés traditionnelles, la conception des rôles et de la place de chacun et chacune est encore très stéréotypée. Pour cette raison, la présence des femmes dans la rue, qui représente l’espace public, est un double défi : celui de la contestation du pouvoir et celui de la contestation d’un système patriarcal qui l’enferment dans un rôle qu’elle rejette de plus en plus fort.
En Egypte, alors que la contestation se poursuit, l’armée n’ayant pas encore lâcher une once de son pouvoir, on constate la volonté de rappeler au femmes que la rue n’est pas leur place, et de leur faire payer le prix de cette présence par une atteinte à leur dignité et à leur féminité; ceci à travers une domination violente de leur corps, reprise du pouvoir de l’homme sur la femme. Ainsi, déshabillage et viol deviennent le moyen de répression à leur encontre.
En temps que féministe musulmane, nous sommes également très inquiètes de la possibilité d’instrumentaliser la religion pour justifier un retour des femmes à la maison. Rappelons-le fort, les femmes musulmanes doivent prendre leur place au niveau sociale, politique, économique et associatif, et rien ne s’y oppose dans la religion. Les stéréotypes de genre sont une construction sociale basée sur des traditions culturelles. La femme musulmanes peut sans problème être présente et visible dans la société.
Si l’armée est impliquée, c’est également tout l’appareil judiciaire qui soutient cette répression en ne donnant pas suite aux plaintes pour viol. Cette impunité est insoutenable.
Que ce soit en Biélorussie, en Egypte, en Syrie ou dans tout autre endroit du monde, les femmes doivent pouvoir s’exprimer et être protégées par les organismes d’Etat, ce qui est aujourd’hui l’inverse dans bien des pays.
Par notre présence, nous affirmons que les femmes qui revendiquent pacifiquement des changements de société pour un monde meilleur doivent être protégées.
Bastabas : basta de tabasser les femmes.