Communiqué de presse
Violence domestique et femmes migrantes
Les lois actuelles sont insuffisantes pour protéger efficacement les migrantes victimes de violence domestique. C’est à cette conclusion qu’arrive l’Observatoire suisse du droit d’asile et des étrangers (ODAE-Suisse) dans son rapport « Violence domestique et femmes migrantes » publié aujourd’hui. Partant de sept cas particuliers, ce rapport montre les difficultés auxquelles sont confrontées les migrantes souhaitant quitter leur mari violent.
L’autorisation de séjour des migrantes qui viennent en Suisse par le biais d’un regroupement familial n’est pas autonome, mais liée, pendant les trois premières années, à l’existence du mariage. Comme le montre le cas d’« Areva », cette dépendance entraîne régulièrement des situations problématiques pour les migrantes victimes de violence. Pendant son mariage, « Areva » a été à maintes reprises menacée et battue par son mari. Lorsqu’elle s’est séparée de lui juste avant la fin de leur troisième année de mariage, le service des migrations a refusé de prolonger son autorisation de séjour.
Prouver la violence domestique
La loi sur les étrangers prévoit que les migrantes comme « Areva » peuvent rester en Suisse même après leur séparation pour autant qu’elles parviennent à prouver la violence domestique. Comme « Areva » n’a été en mesure d’établir la réalité des abus subis ni par des rapports de police ni par des certificats médicaux, elle a dû quitter la Suisse.
Ce cas d’espèce et d’autres exemples énumérés dans le rapport montrent que l’exigence de la preuve constitue un obstacle très souvent insurmontable. Si, par peur de leur mari ou par ignorance du système juridique suisse, les migrantes ne font pas constater la violence subie par la police ou par des médecins, leurs chances sont extrêmement réduites. D’autres indices, comme une attestation d’une maison d’accueil pour femmes ou le témoignage de voisins, ne sont guère pris en considération par les autorités.
« Une difficulté supplémentaire », déclare Claudia Dubacher, secrétaire de l’ODAE-Suisse, « est que les autorités compétentes en matière de migration considèrent fréquemment la violence subie comme trop peu intense. » Selon elle, il n’est bien souvent pas facile à comprendre où les autorités fixent la limite entre la « violence » et la « violence trop peu intense ».
Choix entre les coups et le renvoi
Les dispositions actuelles du droit des étrangers ont souvent pour effet de pousser les victimes de violence domestique à retourner chez leur mari violent. Cette thèse est également soutenue par des expertes telles que Claudia Hauser de l’Organisation faîtière des maisons d’accueil pour femmes de Suisse et du Liechtenstein (DAO) : « Nous rencontrons souvent des femmes qui persistent à rester chez leur mari violent pour ne pas devoir retourner dans leur pays de provenance. » En outre, les femmes spécialistes relèvent que les migrantes ne sont la plupart du temps pas suffisamment informées de leurs droits et des possibilités d’obtenir de l’aide.
Maria Roth-Bernasconi, conseillère nationale socialiste genevoise, a maintes fois attiré l’attention sur cette problématique ces dernières années et s’est engagée au Parlement pour une protection plus efficace des migrantes victimes de violence. Elle considère l’adaptation d’une directive de l’Office fédéral des migrations annoncée pour l’été 2011 comme « un pas important dans la bonne direction ». Il est notamment prévu que les services des migrations soient désormais invités à considérer les attestations des maisons d’accueil pour femmes et autres organismes spécialisés comme des indices de l’existence d’une violence domestique. Le fardeau de la preuve pourra ainsi être quelque peu allégé pour les migrantes.
Aux yeux de l’ODAE-Suisse, le point crucial des modifications envisagées se situe toutefois dans leur mise en œuvre et donc avant tout au niveau des cantons. « C’est seulement si les services des migrations concrétisent les changements prévus et font usage de leur pouvoir d’appréciation de manière équitable et sans arbitraire que les intérêts des migrantes victimes de violence seront mieux protégés », affirme Ruth-Gaby Vermot, présidente de l’ODAE-Suisse.
Les chiffres de l’Office fédéral de la statistique révèlent qu’il y a en Suisse une moyenne annuelle de 22 femmes (migrantes et suisses) qui décèdent des suites de violence domestique. Selon des estimations, près de 20% de la totalité des femmes vivant en Suisse subissent des violences physiques ou sexuelles au cours de leur vie.
Violence domestique et femmes migrantes .doc
En cas de questions:
Claudia Dubacher I Secrétaire centrale de l’ODAE-Suisse I 031 381 45 40 I 079 658 46 12
Ruth-Gaby Vermot-Mangold I Présidente de l’ODAE-Suisse I 079 345 58 18
Maria Roth-Bernasconi I Conseillère nationale, Genève I 078 781 71 13
Claudia Hauser I Représentante de la DAO I 079 793 51 76
L'Association suisse pour l'Observatoire du droit d'asile et des étrangers