Plusieurs dizaines de militants et syndicalistes de la CGAS - Communauté genevoise d'action syndicale -, ainsi que les membres des partis et des associations d’Italiens à Genève se sont rassemblés mercredi midi devant la Consulat d’Italie à Genève pour exprimer leur solidarité envers Carola Rackete.
Nous militants et syndicalistes de la CGAS - Communauté genevoise d'action syndicale -, ainsi que les membres des partis et des associations d’Italiens à Genève sommes profondément choqués et révoltés par la politique migratoire de l’actuel gouvernement italien qui continue à mépriser les règles les plus élémentaires du droit international. Cette conduite dangereuse ne fait que mettre à mal l’état de droit de la république italienne dans un moment rendu très délicat aussi par les propos xénophobes tenus par certains représentants des formations politiques au pouvoir à Rome.
Nous vous demandons donc de transmettre au président du gouvernement italien, Maitre Giuseppe Conte, notre demande de:
- S’engager à respecter toutes les traités et conventions internationales ratifiées par l’Italie en matière de migrations, droits de l’Homme et droit maritime international.
- Ouvrir des corridors humanitaires en Méditerranée pour mettre fin aux nombreuses tragédies de ces dernières années.
- Considérer la Libye comme une zone de guerre et tous ses ports comme des ports non sécurisés.
- Permettre à tous les ports italiens d’accueillir tous les bateaux ayant effectué des opérations de sauvetage.
- Demander les démissions du ministre Matteo Salvini.
Umberto Bandiera, Secrétaire syndical - Unia Région Genève
Discours de Julien Repond, Ensemble à Gauche
Comment en est-on arrivé là ? Comment des personnes qui prêtent secours à d’autres personnes en danger de mort peuvent-elles finir derrière des barreaux et être traduites en justice ?
Ces dernières années ont vu un nombre sans précédent de personnes jetées sur les chemins de l’exil, fuyant la guerre, la violence ou luttant pour leur survie. Face à cette tragédie, l’accueil d’une infime partie de ces réfugiés en Europe pose problème. Ce « problème » reflète une crispation identitaire croissante et très inquiétante de l’Europe, phénomène dans lequel nous voyons ce continent sombrer depuis plusieurs années déjà !
Dans le sillage de leurs prétentions nationalistes, les extrêmes droites européennes ont banalisé la haine de l’étranger. Devant le succès de la recette, une droite « décomplexée » les a suivis et, jusque dans les rangs des formations sociales-démocrates aux quatre coins de l’Europe, des voix soit disant « pragmatiques » se sont levées et ont offert un écho à ces discours pour l’ériger en système.
Au fil de ces dernières décennies, l’Europe s’est dotée de politiques migratoires communes, qui l’ont transformée en une forteresse impénétrable, au travers des accords de Dublin. Un système inhumain qui réduit comme peau de chagrin le droit d’asile.
Des élites responsables de cette situation aux populations, dans nos quotidiens, nombreux sont ceux qui ont adopté ce discours. Alors que leur haine face à une précarisation croissante est légitime, ils se trompent d’ennemi et concentrent leurs coups sur celui qu’on leur a servi en pâture : le migrant, la migrante et tous ceux qui refusent cette fatalité et leur viennent en aide. Et cette haine a depuis longtemps dépassé le champ du verbal. En Italie, des centres sociaux logeant des migrants brûlent et les agressions racistes appartiennent désormais au quotidien ! Dans les médias sociaux, ils sont désormais des milliers à se réjouir de voir des vies englouties par les flots.
Si nous connaissons toutes et tous ici trop bien cet historique, il n’est pas inutile de se le remémorer. Car les nouvelles lois anti-migrations votées par l’Italie, l’interdiction de reprendre la mer pour l’Aquarius ou les arrestations de Carola Rakete et de Pia Klemp pour lesquelles nous sommes toutes réunies aujourd’hui ne représente pas l’avènement d’un nouveau système dont Salvini serait le seul responsable. Ils s’inscrivent dans une suite logique. Si le gouvernement Salvini - Di Maio est le pire et qu’il a fait monter d’un degré supplémentaire l’atrocité, il ne faut pas oublier qu’il s’inscrit dans la continuité sordide d’une pente sur laquelle nous sommes depuis longtemps engagés… et dont une large part du spectre politique est responsable.
En Italie, le traitement de l’immigration est depuis des annéesparmi les plus durs de toute l’Union européenne. On peut notamment rappeler ici que c’est à un ministre de l’intérieur du PD, Minniti, que l’on doit une des premières fermetures des ports aux navires des ONG, en juin 2017. La rue l’avait fait à l’époque reculer… Mais l’époque a changé.
Arrivés au pouvoir, la LEGA et le M5S n’ont fait que taper plus fort encore sur le même clou qui avait déjà été enfoncé par tous leurs prédécesseurs.
Avec le « Décret sur la sécurité et l’immigration », la LEGA et le M5S ont fait passé parmi les dispositions les plus autoritaires et réactionnaires de toute l’histoire de l’Italie. Devenu loi en novembre 2018, ce décret prévoit entre autres choses l’abrogation du permis de séjour pour motif humanitaire, le doublement des jours de détentions dans les Centres administratifs, l’impossibilité faite aux demandeurs d’asile d’être inscrits dans les registres d’état civil et donc d’accéder au droit de résidence. En termes de « sécurité », le décret autorise l’expérimentation de l’utilisation de taser dans les Communes de plus de 100'000 habitants et, entre autres choses, des sanctions plus lourdes pour celles et ceux qui promeuvent l’occupation de terrains ou d’édifice… allant jusqu’à deux ans de prison.
Comme si tout cela ne suffisait pas, un Décret sur la sécurité bis a été voté au mois de juin de cette année. C’est d’ailleurs en vertu de ce décret bis que Carola Raketea été arrêtée ! Toute forme de solidarité envers des migrants est désormais considérée comme un délit. Et même si Carolaa été libérée, cela ne constitue qu’une petite victoire qui ne change fondamentalement rien ni au fait que des milliers de migrant-e-s se noient, ni au fait que les politiques migratoires tuent à petit feu.
Quelle sera la prochaine étape ? Qu’opposer à cette barbarie, alors même que la vision de corps vomis sans vie par la mer ne parvient pas à la raisonner ? La réponse semble aujourd’hui introuvable.
Face à la responsabilité historique coloniale de l’Europe, face à sa responsabilité impérialiste dans les conflits sociaux ou armés qui embrasent ou ont secoué ces dernières années le pourtour de la Méditerranée, face à sa responsabilité climatique dans la dégradation des conditions de vie des personnes jetées sur les chemins de l’exil où bon nombre d’hommes, de femmes et d’enfants subissent des violences sexuelles ou sont réduits à l’esclavage, la lutte en faveur d’un accueil inconditionnel est désormais devenu une obligation.
Et cette lutte ne connaît ni compromis ni moindre mal. En menant des politiques d’asile restrictives et répressives, la droite modérée et les sociaux-démocrates ont créé le terreau fertile à la situation face à laquelle nous sommes aujourd’hui. Cela n’est plus possible aujourd’hui, en Italie comme en Suisse !
Plus un seul centimètre de terrain ne doit être lâché à ces monstres. Ce n’est qu’en avançant ensemble et inflexibles que nous pouvons espérer reconquérir l’humanité si menacée qui fait que nous sommes réuni-e-s aujourd’hui !
Merci beaucoup
Vidèo
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